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Les ouvriers
DE L'ANCIENNE FRANCE
Le temps n'est -pas si loin — il ne remonte guè re -plus haut que nos grands- parents — où le travail n'é tait pas considé ré comme une sorte de bagne terrestre. Plutô t que d'aspirer aux «loisirs» — mot alors dé pourvu de sens pour la plupart des gens —, l'homme se dé livrait de sa tâ che en l'accomplissant avec amour, c'est-à -dire de son mieux.
C'est cette vertu que CHARLES PÉ GUY,.d'une expression à la fois populaire et religieuse, a si justement appelé e «la pié té de l'ouvrage bien faite» chez, les ouvriers de l'ancienne France.
Ces ouvriers ne servaient pas. Ils travaillaient. Ils avaient un honneur, absolu, comme c'est le propre d'un honneur. Il fallait qu'un bâ ton de chaise fut bien fait. C'é tait entendu. C'é tait un primat2. Une fallait pas qu'il fû t bien fait pour le salaire ou moyennant le salaire. Il ne fallait pas qu'il fû t bien fait pour le patron ni pour les connaisseurs ni pour les clients du patron. Il fallait qu'il fû t bien fait lui-mê me, en lui-mê me, pour lui-mê me, dans son ê tre mê me. Une tradition, venue, monté e du plus profond de la rасе, une histoire, un absolu, un honneur voulait que ce bâ ton de chaise fû t 'bien fait. Toute partie, dans la chaise, qui ne se voyait pas, é tait exactement aussi parfaitement faite que ce qu'on voyait. C'est le principe mê me des cathé drales.
Et encore c'est moi qui en cherche si long, moi, dé gé né ré. Pour eux, chez eux, il n'y avait pas l'ombre d'une ré flexion. Le travail é tait là. On travaillait bien.
Il ne s'agissait pas d'ê tre vu ou pas vu. C'é tait l'ê tre mê me du travail qui devait ê tre bien fait.
Et un sentiment incroyablement profond de ce que nous pommons aujourd'hui l'honneur du sport, mais en ce temps-là ré pandu partout. Non seulement l'idé e de faire rendre le mieux, mais l'idé e, dans le mieux, dans le bien, de faire rendre le plus. Non seulement à qui ferait le mieux, mais à qui en ferait le plus, c'é tait un beau sport continuel, qui é tait de toutes les heures, dont la vie mê me é tait pé né tré e. Tissé e. Un dé goû t sans fond pour l'ouvrage mal fait. Un mé pris plus que de grand seigneur pour celui qui eû t toal travaillé. Mais l'idé e ne leur en venait mê me pas.
Tous les honneurs convergeaient en cet honneur... Tout é tait un rythme et un rite et une cé ré monie depuis le petit lever Tout é tait un é vé nement; sacré. Tout é tait une tradition, un enseignement, tout é tait lé gué, tout é tait la plus sainte habitude. Tout é tait une é lé vation, inté rieure, et une priè re, toute la journé e, le sommeil et la veille, le travail et le peu de repos, le lit et
la table, la soupe et le boeuf4, la maison et le jardin, la porte et la rue, la cour et le pas de porte, et les assiettes sur la table*.
CHARLES PEGUY. L'Argent (1913)
Примечания:
1. Ouvrage est un nom masculin, mais la langue populaire en fait un fé minin. 2. При- мат: главный, основополагающий принцип. В начале XX в, это слово было еще не- обычным в разговорном языке. 3. Намек на так называемый «petit lever», i.e. малым утренний прием короля, который по дворцовому этикету начинался после того, как король проснется и прочитает утреннюю молитву. На него допускались приближен- ные короля. Большой утренний прием начинался после того, как короля побреют и причешут. В нем имели право участвовать все представленные ко двору. 4. Армейское выражение (и Пеги не пренебрегает им), часть соленой солдатской шутки. Пеги не гнушался использовать в своем творчестве образчики народного остроумия и даже каламбуры.
Вопросы:
*N'y a-t-il pas dans ce texte une idé alisation excessive du passé? Comment peut-elle s'expliquer?
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