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En Languedoc: uzès et ses environs
Terre brû lé e de soleil et infesté e de bruyantes cigales: tel é tait apparu le Languedoc au jeune Jean Racine, quand son oncle, le chanoine Sconin, l'avait appelé prè s de lui à Uzè s. Au contraire, la charmante petite cité inspira à ANDRÉ GIDE, qui y vint tout enfant passer des vacances chez sa grand-mè re paternelle, une immé diate et durable sympathie.
J'aimais passionné ment la campagne aux environs d'Uzè s, la vallé e de la Fontaine d'Eure et, par-dessus tout, la garrigue1. Les premiè res anné es, Marie, ma bonne, accompagnait mes promenades (...).
En continuant la route qui continue le Sarbonnet, un petit mamelon calcaire, au sortir de la ville on gagnait les pré s verdoyants que baigne la Fontaine d'Eure. Les plus mouillé s d'entre eux s'é maillaient au printemps de ces gracieux narcisses blancs dits «du poè te», qu'on appelle là -bas des courbadonnes. Aucun Uzé tien ne songeait à les cueillir, ni ne se serait dé rangé pour les voir; de sorte que, dans ces pré s toujours solitaires, il y en avait une extraordinaire profusion; l'air en é tait embaumé loin à la ronde; certains penchaient leur face au-dessus de l'eau, comme dans la fable que l'on m'avait apprise, et je ne voulais pas les cueillir; d'autres disparaissaient à demi dans l'herbe é paisse; mais le plus souvent, haut dressé sur sa tige, parmi le sombre gazon, chacun brillait comme une é toile. Marie, en bonne Suissesse, aimait les fleurs; nous en rapportions des brassé es.
La Fontaine d'Eure est cette constante riviè re que les Romains avaient capté e et amené e jusqu'à Nî mes par l'aqueduc fameux du Pont du Gard. La vallé e où elle coule, à demi caché e par des aulnes, en approchant d'Uzè s, s'é tré cit. О petite ville d'Uzè s! Tu serais en Ombrie3 des touristes accourraient de Paris pour te voir! Sise au bord d'une roche dont le dé valement brusque est occupé en partie parles ombreux jardins du duché, leurs grands arbres, tout en bas, abritent dans le lacis de leurs racines les é crevisses de la riviè re. Des terrasses de la Promenade ou du Jardin public, le regard, à travers les hauts micocouliers4 du duché, rejoint, de l'autre cô té de l'é troite vallé e, une roche plus abrupte encore, dé chiqueté e, creusé e de grottes, avec des arcs, des aiguilles et des escarpements pareils à ceux des falaises marines; puis, au-dessus, la garrigue rauque, toute dé vasté e de soleil.
Marie, qui se plaignait sans cesse de ses cors" montrait peu d'enthousi- asme pour les sentiers raboteux de la garrigue; mais bientô t enfin ma mè re me laissa sortir seul et je pus escalader tout mon soû l6.
On traversait la riviè re à la F on di Biau (je ne sais si j'é cris correctement ce qui veut dire, dans la langue de Mistral: fontaine aux bœ ufs) aprè s avoir suivi quelque temps le bord de la roche, lisse et tout usé e par les pas, puis descendu les degré s taillé s dans la roche. Qu'il é tait beau de voir les lavandiè res y poser lentement leurs pieds nus, le soir, lorsqu'elles remontaient du travail, toutes droites et la dé marche comme ennoblie par cette charge de lin blanc qu'elles portaient, à la maniè re antique, sur la tê te. Et comme la «Fontaine d'Eure» é tait le nom de la riviè re, je ne suis pas certain que, de mê me, ces mots «fon di biau» dé signassent pré cisé ment une fontaine: je revois un moulin, une mé tairie qu'ombrageaient d'immenses platanes; entre l'eau libre et l'eau qui travaillait au moulin, une sorte d'î lot, où s'é battait la basse-cour. A l'extrê me pointe de cet î lot, je venais rê ver ou lire, juché sur le tronc d'un vieux saule et caché par ses branches, surveillant les jeux aventureux des canards, dé licieusement assourdi par le ronflement de la meule, le fracas de l'eau dans la roue, les mille chuchotis de la riviè re, et plus loin, où lavaient les laveuses, le claquement rythmé de leurs battoirs*.
Mais le plus souvent.brû lant7 la Fon di Biau, je gagnais en courant la garrigue, vers où 8 m'entraî nait dé jà cet é trange amour de l'inhumain, de l'aride, qui, si longtemps, me fit pré fé rer à l'oasis le dé sert. Les grands souffles secs, embaumé s, l'aveuglante ré verbé ration du soleil sur la roche nue sont enivrants comme le vin. Et combien m'amusait l'escalade des roches; la chasse aux mantes religieuses qu'on appelle là -bas des «prega-
Diou», et dont les paquets d'œ ufs, conglutiné s et pendus à quelque brindille, m'intriguaient si fort; la dé couverte, sous les cailloux que je soulevais, des hideux scorpions, mille-pattes et scolopendres**!
ANDRÉ GIDE. Si le grain ne meurt (1926). Примечания:
1. Необрабатываемые, заросшие кустарником земли на склонах гор. 2. Имеется в виду миф о Нарциссе, прекрасном юноше, который, увидев свое отражение в воде, влюбился в него. Боги превратили его в цветок, носящий его имя. 3. Если бы ты был в Умбрии... — провинция в Италии, где родился св.Франциск Асизский. 4. Каменное или железное дерево, произрастающее на юге Франции. Достигает высоты 20 м. 5. Ороговевший нарост на пальце ноги, причиняющий боль. 6. В свое удовольствие, вдосталь. 7. Не останавливаясь. 8, Lieu vers lequel... 9. Провансальское название бого- мола (насекомое). Французский эквивалент — Prie-Dieu.
Вопросы.
* On é tudiera l'ait de la description dans tout ce paragraphe: attitudes des lavandiè res; é vocation de la faune et de la flore; bruits des eaux.
** André Gide a toujours é prouvé un goû t trè s vif pour les sciences naturelles. Montrer comment ce penchant se manifeste ici.
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