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Royal Cambouis






Il est de bon goût dans l’armée française de blaguer le train des équipages. Très au-dessus de ces brocards, les bons tringlots laissent dire, sachant bien, qu’en somme, c’est seulement au Royal Cambouis où tout le monde a chevaux et voitures.

 

Chevaux et voitures! Cet horizon décida le jeune Gaston de Puyrâleux à contracter dans cette arme, qu’il jugeait d’élite, un engagement de cinq ans.

 

Avant d’arriver à cette solution, Gaston avait cru bon de dévorer deux ou trois patrimoines dans le laps de temps qu’emploie le Sahara pour absorber, sur le coup de midi et demi, le contenu d’un arrosoir petit modèle.

 

Le jeu, les tuyaux, les demoiselles, les petites fêtes et la grande fête avaient ratissé jusqu’aux moelles le jeune Puyrâleux. Mais c’est gaîment tout de même et sans regrets qu’il «rejoignit» le 112e régiment du train des équipages à Vernon.

 

Un philosophe optimiste, ce Gaston, avec cette devise: «La vie est comme on la fait».

 

Et il se chargeait de la faire drôle sa vie, drôle sans relâche, drôle quand même.

 

Adorant les voitures, raffolant des chevaux, Puyrâleux n’eut aucun mérite à devenir la crème des tringlots.

 

Son habileté proverbiale tint vite de la légende: il eût fait passer le plus copieux convoi par le trou d’une aiguille sans en effleurer les parois.

 

Vernon s’entoure de charmants paysages, mais personnellement c’est un assez fâcheux port de mer. Pour ne citer qu’un détail, ça manque de femmes, ô combien! De femmes dignes de ce nom, vous me comprenez?

 

Entre la basse débauche et l’adultère, Gaston de Puyrâleux n’hésita pas une seconde: il choisit les deux.

 

Il aima successivement des marchandes d’amour tarifé, des charcutières sentimentales, le tout sans préjudice pour deux ou trois épouses de fonctionnaires et une femme colosse de la foire.

 

Ajoutons que cette dernière passion demeura platonique et fut désastreuse pour la carrière du jeune et brillant tringlot.

 

La Belle Ardennaise était-elle vraiment la plus jolie femme du siècle, comme le déclarait l’enseigne de sa baraque? Je ne saurais l’affirmer, mais elle en était sûrement l’une des plus volumineuses…

 

Son petit mollet aurait pu servir de cuisse à plus d’une jolie femme; quant à sa cuisse, seule une chaîne d’arpenteur aurait pu en évaluer les suggestifs contours.

 

Sa toilette se composait d’une robe en peluche chaudron qui s’harmonisait divinement avec une toque de velours écarlate. Exquis, vous dis-je!

 

Et voilà-t-il pas que cet idiot de Gaston se mit à devenir amoureux, amoureux comme une brute de la Belle Ardennaise!

 

Mais la Belle Ardennaise ne pesait pas tant de kilos pour être une femme légère et Puyrâleux en fut pour ses frais de tendresse et ses effets de dolman numéro 1.

 

Ce serait mal connaître Puyrâleux que de le croire capable d’accepter une aussi humiliante défaite.

 

Il s’assura que la Belle Ardennaise couchait seule dans sa roulotte, le barnum et sa femme dormant dans une autre voiture.

 

Le dessein de Gaston était d’une simplicité biblique.

 

Par une nuit sombre, aidé de Plumard, son dévoué brosseur, il arriva sur le champ de foire, lequel n’était troublé que par les vagues rugissements de fauves mélancolieux.

 

En moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire, il attela à la roulotte de la grosse dame deux chevaux appartenant au gouvernement français, déchaîna les roues, fit sauter les cales…

 

Et les voilà partis à grande allure vers la campagne endormie.

 

Rien d’abord ne révéla, dans la voiture, la présence d’âme qui vive.

 

Mais bientôt, les dernières maisons franchies, une fenêtre s’ouvrit pour donner passage à une grosse voix rauque, coutumière des ordres brefs, qui poussa un formidable: Halte!

 

Les bons chevaux s’arrêtèrent docilement, et Puyrâleux se déguisa immédiatement en tringlot qui n’en mène pas large.

 

La grosse voix rauque sortait d’un gosier bien connu à Vernon, le gosier du commandant baron Leboult de Montmachin.

 

Prenant vite son parti, Puyrâleux s’approcha de la fenêtre, son képi à la main.

 

À la pâle clarté des étoiles, le commandant reconnut le brigadier:

 

– Ah! c’est vous, Puyrâleux?

 

– Mon Dieu, oui, mon commandant!

 

– Qu’est-ce que vous foutez ici?

 

– Mon Dieu, mon commandant, je vais vous dire: me sentant un peu mal à la tête, j’ai pensé qu’un petit tour à la campagne! …

 

Pendant cette conversation un peu pénible des deux côtés, le commandant réparait sa toilette actuellement sans prestige.

 

La Belle Ardennaise proférait contre Gaston des propos pleins de trivialité discourtoise.

 

– Vous allez me faire l’amitié, Puyrâleux, conclut le commandant Leboult de Montmachin, de reconduire cette voiture où vous l’avez prise… Nous recauserons de cette affaire-là demain matin.

 

Inutile d’ajouter que ces messieurs ne reparlèrent jamais de cette affaire-là, mais Puyrâleux n’éprouva aucune surprise, au départ de la classe, de ne pas se voir promu maréchal des logis.

 

Et il le regretta bien vivement, car s’étant toujours piqué d’être dans le train, il espérait y fournir une carrière honorable.

 


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