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Pilote de liqne






Tout le monde connaî t le nom de Blé riot, de Guynemer, de Pelletier d'Oisy, de
Mermoz, de Clostermann, de tous les aviateurs enfin que des raids
spectaculaires ou des services de guerre é clatants ont placé s en vedette. Mais il
est d'autres pilotes, ceux qui se consacrent au transport des voyageurs ou du
courrier, dont la vie, pourtant si souvent mise en pé ril, est ignoré e du grand
public.

C'est pour ces hé ros mé connus que SAINT-EXUPÉ RY, avant de disparaî tre au
cours d'une reconnaissance, en 1944, a é crit ses fameux romans Vol de Nuit et
Terre des Hommes.

La femme du pilote, ré veillé e par le té lé phone, regarda son mari et
pensa:

«Je le laisse dormir encore un peu».

Elle admirait cette poitrine nue, bien caré né e1, elle pensait à un beau
navire.

Il reposait dans ce lit calme, comme dans un port, et, pour que rien
n'agitâ t son sommeil, elle effaç ait du doigt ce pli, cette ombre, cette houle2,
elle apaisait ce lit, comme, d'un doigt divin, la mer.

Il ouvrit les yeux.

«Quelle heure est-il?

— Minuit.

— Quel temps fait-il?

— Je ne sais pas...»

II se leva. Il marchait lentement vers la fenê tre en s'é tirant.
«Je n'aurai pas trè s froid. Quelle est la direction du vent?

— Comment veux-tu que je sache...»
Il se pencha:

«Sud. C'est trè s bien. Ç a tient au moins jusqu'au Bré sil.»

Il remarqua la lune et se connut riche*. Puis ses yeux descendirent sur
la ville. Il ne la jugea ni doué e, ni lumineuse, ni chaude. Il voyait dé jà
s'é couler le sable vain de ses lumiè res3.

«A quoi penses-tu?»

Il pensait à la brume possible du cô té de Porto Alegre.

«J'ai ma tactique. Je sais par où faire le tour...»

II s'inclinait toujours. Il respirait profondé ment, comme avant de se
jeter, nu, dans la mer.

«Tu n'es mê me pas triste... Pour combien de jours t'en vas-tu?» Huit, dix
jours. Il ne savait pas. Triste, non; pourquoi?


Ces plaines, сes villes, ces montagnes... Il partait libre, lui semblait-il,
à leur conquê te, II pensait aussi qu'avant une heure il possé derait et
rejetterait Buenos Aires4

Il sourit:

«Cette ville... j'en serai si vite loin. C'est beau de partir la nuit. On tire
sur la manette des gaz, face au Sud, et dix secondes plus tard on renverse le
paysage, face au Nord. La ville n'est plus qu'un fond de mer.» Elle pensait
à tout ce qu'il faut rejeter pour conqué rir**.

«Tu n'aimes pas ta maison?

— J'aime ma maison...»

Mais dé jà sa femme le savait en marche. Ces larges é paules pesaient
dé jà contre le ciel.

Elle le lui montra.

«Tu as beau temps, ta route est pavé e d'é toiles.»

Il rit:

«Oui.»

Elle posa la main sur cette é paule et s'é mut de la sentir tiè de: cette chair
é tait donc menacé e?..
«Tu es trè s fort, mais sois prudent!

— Prudent, bien sû r...»
Il rit encore.

Il s'habillait. Pour cette fê te, il choisissait les é toffes les plus rudes, les
cuirs les plus lourds, il s'habillait comme un paysan. Plus il devenait lourd,
plus elle l'admirait.

Elle-mê me bouclait cette ceinture, tirait ces bottes.

«Ces bottes me gê nent.

— Voilà les autres.

— Cherche-moi un cordon pour ma lampe de secours.»

Elle le regardait. Elle ré parait elle-mê me le dernier dé faut dans l'armure:
tout s'ajustait bien.
«Tu es trè s beau.»

Elle l'aperç ut qui se peignait soigneusement.
«C'est pour les é toiles?

— C'est pour ne pas me sentir vieux.

— Je suis jalouse...»

Il rit encore, et l'embrassa, et la serra contre ses pesants vê tements. Puis
il la souleva à bras tendus, comme on soulè ve une petite fille, et, riant
toujours, la coucha:

«Dors!»


Et fermant la porte derriè re lui, il fit dans la rue, au milieu de
l'inconnaissable peuple nocturne, le premier pas de sa conquê te.

Elle restait là. Elle regardait, triste, ces fleurs, ces livres, cette douceur,
qui n'é taient pour lui qu'un fond de mer***.

A. DE SAINT-EXUPÉ RY. Vol de Nuit (1932).
Примечания:

1. Обтекаемой формы, как корпус корабля. 2. Морщины на простыне сравнивают-
ся с зыбью на море. 3. Огни города исчезнут из его глаз, когда он взлетит (фраза по-
строена на фразеологическом обороте avoir du sable dans les yeux). 4. Будет обладать
городом сверху, а затем вновь оставит его, взлетев.

Вопросы:

* Expliquez pourquoi.

** Qu'y a-t-il de sain, de tonique, dans cette formule?

*** Comment s'exprime, dans cette page, la tendresse de l'é pouse?


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