ActeII, se. V. 1 страница
Примечания:
1. Кормилица и наперсница Федры. 2. Она собралась говорить с Ипполитом о сво- ем сыне, которого родила от Тезея и за судьбу которого опасается, после того как стало известно о смерти царя Тезея. 3. Ипполит готовится к отъезду в Афины, чтобы занять трон, освободившийся после смерти его отца Тезея. 4 Изложить, представить. 5. Т.е. сторонники Ипполита. Они хотят видеть царем Ипполита, а не сына Федры, который находится еще в младенческом возрасте. 6. Телесные субстанции, которые в психологии XVII в. считались определяющими чувства. Букв чувства. 7. Федра, маче- ха Ипполита, опасается неприязни пасынка, изгнания которого она недавно добилась. 8. Вы видели, что я упорно вам вредить стараюсь. 9. Подвергнуть себя вашей враж- дебности. 10. En: de vous. 11. Этот стих является непосредственной цитатой из Эври- пида. 12. Докучные, неотвязные. 13. Брак: Слово происходит от имени бога- покровителя брака Гименея. 14. Такие же подозрения. 15. Взять в свидетели. 16 Тре- вога, беспокойство. 17. Возвращение Тезея. о котором действительно будет объявлено в следующей сцене. 18. Одна из рек, протекающих в Аиде, царстве мертвых. 19. Я изнываю от любви к нему. 20. Предметов любви (на галантном языке XVII века — возлюбленных). 21. По мифу, Тезей сошел в Аид, чтобы похитить Прозерпину, жену Плутона, владыки царства мертвых. 22. Archaï que. Nous dirions aujourd'hui: aprè s lui. 23. Старая орфография. 24. Осанку. 25. Тезей плавал на остров Крит, где убил Мино- тавра. 26. Миноса, царя Крита, отца Ариадны и Федры. 27. Минотавра. 28. Лабиринта. 29. Чтобы не дать ему заблудиться 30. Ариадна. Она дала Тезею клубок ниток, разма- тывая который, он отмечал свой путь в Лабиринте и смог выйти из него, 31. Нить, от которой зависела жизнь героя. 32. En: снабдить вашу руку этой нитью.... 33. Tout de suite. 34. Лицо, облик. 35. В классическом значении: та, что любит и любима *36. Чес- ти, репутации. 37. Ты слишком ясно дал мне понять. 38. Намек на месть, которой Аф- родита преследовала семейство Федры после того, как сын бога Солнца Гелиос, пре- док героини трагедии, сообщил Гефесту, мужу Афродиты, что она изменяет ему с богом войны Ареем. 39. Совратить с правильного пути. 40. Федра действительно по- требовала от Тезея изгнать Ипполита (см, начало сцены). 41. Какую пользу принесли мне... 42. Тезея. 43. Обиду, которую это сердце тебе нанесло. 44. Отказывает. 45. Или же, если тебе недостаточно... 46. С этими словами Федра вырывает меч из руки Иппо- лита.
Вопросы:
* Par quelles é tapes successives Phè dre pré fare-t-elle l'aveu de son arnoM?
** De quoi est faite la poé sie de ce passage? On en é tudiera plus particuliè rement, lu couleur mythologique.
*** Comment s'exprime la lucidité du personnage dans ce passage? Quel sentiment l'emporte dans votre esprit: l'horreur ou la pitié?
MARIVAUX (1688-1763)
tandis que Regnard et Lesage s'efforç aient d'imiter Moliè re, MARIVAUX, lui, eut le mé rite de chercher un chemin qui lui fû t. propre. Il s'appliqua presque uniquement à l'é tude de l'amour, mais de l'amour naissant, avec ce que cette é closion suppose d'é mois, de surprises, de complications. Autant qu'à Racine, il fait penser à Corneille, parfois si subtil et quasi pré cieux. En fait, le marivaudage, qui dé signe à la fois un style quelque peu affecté et une faç on alambiqué e de concevoir l'amour, apparaî t bien comme une ré surgence de la pré ciosité.
Mais à cô té de cette sorte d'alchimie, il y a place chez Marivaux pour desscè nes vives et gaies, é crites d'une plume exquise.
LE JEU DE L'AMOUR ET DU HASARD (1730)
Silvia et Dorante sont destiné s à s'é pouser. Mais curieux de se mieux connaî tre, ils ont, chacun de son cô té, imaginé de se travestir, elle, en servante, lui, en valet Et ils sont fort é tonné s de dé couvrir, lui, que la servante est bien folie, et elle, que le valet ne manque ni d'esprit ni de distinction.
SILVIA (à part)*. — Ce garç on-ci n'est pas sot, et je ne plains pas la sou- brette1 qui l'aura. Il va m'en conter; laissons-le dire pourvu qu'il m'instruise.
DORANTE (à part). — Cette fille-ci m'é tonne! Il n'y a point de femme au monde à qui sa physionomie ne fî t2 honneur: lions connaissance avec elle... (Haut.) Puisque nous sommes dans le style amical, et que nous avons abjuré les faç ons, dis-moi, Lisette, ta maî tresse te vaut-elle? Elle est bien hardie d'oser avoir une femme de chambre comme toi.
SILVIA. — Bourguignon cette question-là m'annonce que, suivant la coutume, tu arrives avec l'intention de me dire des douceurs: n'est-il pas vrai?
DORANTE. — Ma foi, ]'e n'é tais pas venu dans ce dessein-là, je te l'avoue. Tout valet que je suis, je n'ai jamais eu de grandes liaisons avec les. soubrettes: je n'aime pas l'esprit domestique; mais, à ton é gard, c'est une autre affaire. Comment donc! tu me soumets, je suis presque timide: ma familiarité n'oserait s'apprivoiser avec toi; j'ai toujours envie d'ô ter mon chapeau de dessus ma tê te; et, quand je te tutoie, il me semble que je jure4, enfin, j'ai un penchant à te traiter avec des respects qui te feraient rire. Quelle espè ce de suivante es-tu donc, avec ton air de princesse?
SILVIA. — Tiens, tout ce que tu dis avoir senti en me voyant est pré cisé ment l'histoire de tous les valets qui m'ont vue.
DORANTE. — Ma foi, je ne serais pas surpris quand ce serait aussi l'histoire de tous les maî tres.
SILVIA. — Le trait est joli assuré ment; mais je te le ré pè te encore. Je ne suis pas faite aux cajoleries de ceux dont la garde-robe ressemble à la tienne.
DORANTE. — C'est-à -dire que ma parure ne te plaî t pas. silvia. — Non, Bourguignon, laissons là l'amour et soyons bons amis. DORANTE. — Rien que cela? ton petit traité n'est composé que de deux clauses impossibles.
SILVIA (à part). — Quel homme, pour un valet! (Haut.) Il faut pourtant qu'il s'exé cute; on m'a pré dit que je n'é pouserais jamais qu'un homme de condition6, et j'ai juré depuis de n'en é couter jamais d'autre.
DORANTE. — Parbleu! cela est plaisant: ce que tu as juré pour homme, je l'ai juré pour femme, moi, j'ai fait le serment de n'aimer sé rieusement qu'une fille de condition.
silvia. — Ne fé carte donc pas de ton projet.
DORANTE. — Je ne m'en é carte peut-ê tre pas tant que nous le croyons: tu as l'air bien distingué; et l'on est quelquefois fille de condition sans le savoir.
SILVIA (riant). — Ah! Ah! Ah! Je te remercierais de ton é loge si ma mè re n'en faisait pas les frais.
DORANTE. — Eh bien! venge-t'en sur la mienne, si tu me trouves assez bonne mine pour cela.
SILVIA (à fart). — II le mé riterait. (Haut.) Mais ce n'est pas là de quoi il est question: trê ve de badinage; c'est un homme de condition qui m'est pré dit pour é poux, et je n'en rabattrai rien.
DORANTE. — Parbleu! si j'é tais tel, la pré diction me menacerait; j'aurais peur de la vé rifier. Je n'ai pas de foi à l'astrologie; mais j'en ai beaucoup à ton visage.
SILVIA (à fart). — II ne tarit point... (Haut.) Finiras-tu? Que t'importe la pré diction, puisqu'elle t'exclut?
DORANTE. — Elle n'a pas pré dit que je ne t'aimerais point.
SILVIA. — Non: mais elle a dit que tu ne gagnerais rien; et moi, je te le confirme.
DORANTE. — Tu fais fort bien, Lisette; cette fierté -là te va à merveille; et, quoiqu'elle me fasse mon procè s, je suis pourtant bien aise de te la voir; je te l'ai souhaité e d'abord que7 je t'ai vue: il te fallait encore cette grâ ce-là; et je me console d'y perdre parce que tu y gagnes.
SILVIA (à fart). — Mais, en vé rité, voilà un garç on qui me surprend, malgré que j'en aie8 (Haut.) Dis-moi: qui es-tu, toi qui me parles ainsi?
DORANTE. — Le fils d'honnê tes gens qui n'é taient pas riches.
SILVIA. — Va, je te souhaite de bon cœ ur une meilleure situation que la tienne, et je voudrais pouvoir y contribuer: la fortune a tort avec toi.
DORANTE. — Ma foi! l'amour a plus de tort qu'elle: j'aimerais mieux qu'il me fû t permis de te demander ton cœ ur que d'avoir tous les biens du monde.
silvia (à part). — Nous voilà, grâ ce au Ciel, en conversation ré glé e9. (Haut.) Bourguignon, je ne saurais me fâ cher des discours que tu me tiens; mais, je t'en prie, changeons d'entretien; venons à ton maî tre. Tu peux te passer de me parier d'amour, je pense.
DORANTE. — Tu pourrais bien te passer de m'en faire sentir, toi.
SILVIA. — Ah! je me fâ cherai; tu m'impatientes. Encore une fois, laisse là ton amour.
DORANTE. — Quitte dont ta figure.
SILVIA (à part). — A la fin, je crois qu'il m'amuse... (Haut.) Eh bieh!
Sour-guignon, tu ne veux donc pas finir? Faudra-t-il que je te quitte? (A part.) Je devrais dé jà l'avoir fait.
DORANTE. — Attends, Lisette; je voulais moi-mê me te parler d'autre chose; mais je ne sais plus ce que c'est...
SILVIA. — J'avais de mon cô té quelque chose à te dire, mais tu m'as fait perdre mes idé es aussi, à moi.
DORANTE. — Je me rappelle de10 t'avoir demandé si ta maî tresse te valait.
SILVIA.— Tu reviens à ton chemin par un dé tour: adieu.
DORANTE. — Eh! non, te dis-je, Lisette; il ne s'agit que de mon maî tre.
SILVIA. — Eh bien! soit: je voulais te parler de lui aussi, et j'espè re que tu voudras bien me dire confidemment ce qu'il est. Ton attachement pour lui m'en donne bonne opinion: il faut qu'il ait du mé rite, puisque tu le sers.
DORANTE. — Tu me permettras peut-ê tre bien de te remercier de ce que tu me dis là, par exemple?
silvia. —Veux-tu bien ne prendre pas garde à l'imprudence que j'ai eue de le dire?
DORANTE. — Voilà encore de ces ré ponses qui m'emportent". Fais comme tu voudras, je n'y ré siste point; et je suis bien malheureux de me trouver arrê té par tout ce qu'il y a de plus aimable au monde.
SILVIA. — Et moi, je voudrais bien savoir comment il se lait que j'ai la bonté de fé couter; car assuré ment cela est singulier.
DORANTE. — Tu as raison; notre aventure est unique.
SILVIA (a part). — Malgré tout ce qu'il m'a dit, je ne suis point partie, je ne pars point, me voilà encore, et je ré ponds! En vé rité cela passe la raillerie12. (Haut.) Adieu.
DORANTE. — Achevons ce que nous voulions dire.
SILVIA. — Adieu, te dis-je; plus de quartier11. Quand ton maî tre sera venu, je tâ cherai, en faveur de ma maî tresse, de le connaî tre par moi-mê me, s'il en vaut la peine*.
Acte I, se. VII. 363
Примечания:
1. Субретка — служанка, горничная. 2. Ne pourrait faire honneur (valeur conditionnelle du subjonctif imparfait.)- 3. Фамилию, под которой укрылся Дорант 4. Будто я тебя оскорбляю. 5. Из двух условий. 6. Благородного происхождения. 7. Dè s que. 8. Вопреки мне (si mauvais gré que j'en aie). 9. Разговор, приличествующий людям одного круга. 10. Tour incorrect, se rappeler se construisant sans pré position 11. От которых я теряю хладнокровие. 12. Переходит границы шутки. 13. Букв, ника- кой пощады, прощения не будет.
Вопросы:
* On é tudiera à quelle nuance psychologique correspond chacun des aparté s de la scè ne.
** D'aprè s cet extrait du Jeu de l'Amour et du Hasard, on essaiera de dé finir ces dé tours amoureux qu'on appelle marivaudage. — On marquera aussi les rapports qui peuvent exister entre la poé sie et une certaine forme d'esprit.
BEAUMARCHAIS (1732-1799)
MOINS homme de lettres qu'homme d'affaires, BEAUMARCHAIS a pourtant laissé un nom important dans l'histoire du thé â tre franç ais. Il a é crit deux comé dies dont la verve spirituelle et le mouvement endiablé n'ont nullement vieilli; et il a cré é, avec le personnage de Figaro, un type immortel pour l'ingé niosité dont le fameux barbier fait preuve en toute' circonstance comme pour la hardiesse des opinions qu'il exprime: nous sommes — il faut toujours nous en souvenir — à la veille de la Ré volution.
LE BARBIER DE SÉ VILLE (1775) FIGARO. — Je ne me trompe point; c'est le comte Airnaviva1. LE COMTE. —Je crois que c'est ce coquin de Figaro. FIGARO. — C'est lui-mê me, monseigneur. LE COMTE. — Maraud! si tu dis un mot...
FIGARO.— Oui, je vous reconnais; voilà les bonté s familiè res dont vous m'avez toujours honoré.
LE COMTE. — Je ne te reconnaissais pas, moi. Te voilà si gros et si gras. 364
FIGARO —Que voulez-vous, monsieur, c'est là, ' 'misè re.
LE COMTE. — Pauvre petit! Mais que fais-tu à 'Sé ville? je t'avais autrefois recommandé dans leà bureaux pour un emploi.
FIGARO. — Je l'ai obtenu, monseigneur; et ma reconnaissance...
LE COMTE. — Appelle-moi Lindor. Ne vois-tu pas, à mon dé guisement, que je veux ê tre inconnu?
FIGARO. — Je me retire.
LE COMTE. — Au contraire. J'attends ici quelque chose, et deux hommes qui jasent sont moins suspects qu'un seul qui se promè ne. Ayons l'air de jaser. Eh bien, cet emploi?
FIGARO. — Le ministre, ayant é gard à la recommandation de Votre Excellence, me fit nommer sur-le-champ garç on apothicaire.
LE COMTE. —Dans les hô pitaux de l'armé e? FIGARO. — Non; dans les haras2 d'Andalousie. : LE COMTE, riant. — Beau dé but!
FIGARO. — Le poste n'é tait pas mauvais parce qu'ayant le district des pansements et des drogues, je vendais souvent aux hommes de bonnes mé decines de cheval...
LE COMTE. — Qui tuaient les sujets du roi!
FIGARO. — Ah! ah! il n'y a point de remè de universel; mais qui n'ont pas laissé de gué rir quelquefois des Galiciens, des Catalans, des Auvergnats4
LE COMTE. — Pourquoi donc l'as-tu quitté?
FIGARO.— Quitté? C'est bien lui-mê me; on m'a desservi auprè s des puis- sances. «L'envie aux doigts crochus, au teint pâ le et livide...»
LE COMTE. — Oh! grâ ce! grâ ce, ami! Est-ce que tu fais aussi desvers? Je t'ai vu là griffonnant5 sur ton genou, et chantant dè s le matin.
FIGARO. — Voilà pré cisé ment la cause de mon malheur. Excellence. Quand on a rapporté au ministre que je faisais, je puis dire assez joliment, des bouquets à Chloris6; que j'envoyais des é nigmes7 aux journaux, qu'il courait des madrigaux8 de ma faç on; en un mot, quand il a su que j'é tais imprimé tout vif9, il a pris la chose au tragique et m'a fait ô ter mon emploi,
sous pré texte que l'amour des lettres est incompatible avec l'esprit des affaires.
LE COMTE. — Puissamment raisonné! Et tu ne lui fis pas repré senter...
FIGARO. — Je me crus trop heureux d'en ê tre oublié, persuadé qu'un' grand nous fait assez de bien quand il ne nous fait pas de mal.
LE COMTE. — Tu ne dis pas tout. Je me souviens qu'à mon service tu é tais un assez mauvais sujet.
FIGARO. —Eh! mon Dieu, monseigneur, c'est qu'on veut que le pauvre soit sans dé faut.
LE COMTE. — Paresseux, dé rangé...
FIGARO. — Aux vertus qu'on exige dans un domestique. Votre Excel- lence connaî t-elle beaucoup de maî tres qui fussent dignes d'ê tre valets? LE COMTE, riant. — Pas mal. Et tu t'es retiré en cette ville? FIGARO. — Non, pas tout de suite.
LE COMTE, l'arrê tant. — Un moment... j'ai cru que c'é tait elle10... Dis toujours, je t'entends de reste".
FIGARO. — De retour à Madrid, je voulus essayer de nouveau mes talents litté raires; et le thé â tre me parut un champ d'honneur...
LE COMTE. — Ah! misé ricorde!
FIGARO. — (Pendant sa ré plique, le comte regarde avec attention du cô té de la jalousien.) En vé rité, je ne sais comment je n'eus pas le plus grand succè s, car j'avais rempli le parterre des plus excellents travailleurs13; des mains... comme des battoirs; j'avais interdit les gants, les cannes, tout ce qui ne produit que des applaudissements sourds; et d'honneur, avant la piè ce, le café 14 m'avait paru dans les meilleures dispositions pour moi. Mais les efforts de la cabale15...
LE COMTE. — Ah! la cabale! monsieur l'auteur tombé!..
FIGARO. — Tout comme un autre: pourquoi pas? Ils m'ont sifflé; mais si jamais je puis les rassembler...
LE COMTE. — L'ennui te vengera bien d'eux? figaro. — Ah! comme je leur en garde16, morbleu!
LE COMTE. — Tu jures! Sais-tu qu'on n'a que vingt-quatre heures au palais pour maudire ses juges?
FIGARO. — On a vingt-quatre ans au thé â tre; la vie est trop courte pour user un pareil ressentiment.
LE COMTE. —Ta joyeuse colè re me ré jouit. Mais tu ne me dis pas ce qui t'a fait quitter Madrid.
FIGARO. — C'est mon bon ange. Excellence, puisque je suis assez heureux pour retrouver mon ancien maî tre. Voyant à Madrid que la ré publique des lettres é tait celle des loups, toujours armé s les uns contre les autres, et que, livré s au mé pris où ce risible acharnement les conduit, tous les insectes, les moustiques, les cousins, les critiques, les maringouins17, les envieux, les feuillistes, les libraires, les censeurs, et tout ce qui s'attache à la peau des malheureux gens de lettres, achevaient de dé chiqueter et sucer le peu de substance qui leur restait; fatigué d'é crire, ennuyé de moi, dé goû té des autres, abî mé de dettes et lé ger d'argent; à la fin convaincu que l'utile revenu du rasoir est pré fé rable aux vains honneurs de la plume, j'ai quitté Madrid; et, mon bagage en sautoir, parcourant philosophiquement les deux Castilles, la Manche, l'Estramadure, la Sierra- Morena, l'Andalousie; accueilli dans une ville, emprisonné dans l'autre, et partout supé rieur aux é vé nements; loué par ceux-ci, blâ mé par ceux-là; aidant au bon temps; supportant le mauvais; me moquant des sots, bravant les mé chants; riant de ma misè re et faisant la barbe à tout le monde — vous me voyez enfin é tabli dans Sé ville, et prê t à servir de nouveau Votre Excellence en tout ce qu'il lui plaira m'ordonner*.
LE COMTE. — Qui t'a donné une philosophie aussi gaie? FIGARO. — L'habitude du malheur. Je me presse de rire de tout, de peur d'ê tre obligé d'en pleurer**.
Acte 1, sc.ï ï Примечания:
1. Граф Альмавива переоделся студентом, чтобы иметь возможность оказаться по- ближе к Розине, в которую он влюблен. Под ее окном он сталкивается с цирюльником Фигаро. 2. На конных заводах. 3. Сильнодействующие лекарства, а также лошадиные дозы. 4. Ходячая французская шутка об овернцах, которые считаются людьми креп- кими и грубыми. 5. Торопливо пишущим. 6. Клорида — одно из женских имен, упот-
реблявшихся в галантной поэзии. 7. Загадки. 8 Небольшие комплиментарные стихо. творения. 9. Что печатался при жизни. 10. Розина, в которую он влюблен 11 D'ailleurs, du reste, впрочем 12 Жалюзи. 13 Имеются в виду клакеры, которые за деньги поддерживали аплодисментами автора и пьес) 14. Кофейни. В ту эпоху ко- фейня была местом, где собирались литераторы. 15. Шайки, клики, г.е тех, кго хотет бы провалить пьесу 16. Il leur en garde de la rancune — затаил злобу 17 Разновид- ность комаров. Здесь имеет место игра слов: Mann — королевский цензор, которого недолюбливал Бомарше.
Вопросы:
* Relever les traits de satire sociale contenus dans ce morceau.
** En quoi le comique de Beaumarchais diffè re-t-û lie celui de Moliè re et de celui de Marivaux?
LA «PREMIÈ RE» D'HERNANI (1830)
RlEN que la piè ce d'Hernani contienne, far elle-mê me, des beauté s estimables encore aujourd'hui, on ne lui accorderait certainement pas une place de cette importance dans l'histoire du thé â tre franç ais, si, lors de la premiè re repré sentation, elle n'avait donné lieu à une «bataille» aussi bruyante que spectaculaire. En fait, elle permit aux partisans et aux ennemis du romantisme de se dé partager en deux factions ré solument opposé es, dont le parti é tait pris avant mê me que le drame eû t é té joué...
A relire les savoureuses relations qui nous ont é té laissé es de cette « premiè re» mé morable, on s'apercevra, en tout cas, que la nouvelle é cole ne manquait pas de pittoresques dé fenseurs.
Pour bien combiner leur plan straté gique et bien assurer leur ordre de bataille, les jeunes gens' demandè rent à entrer dans la salle avant le public. On le leur permit, à condition qu'ils seraient entré s avant qu'on ne fî t queue. On leur donna jusqu'à trois heures. C'eû t é té bien si on les avait laissé s monter, comme faisaient les claqueurs2, par la petite porte de l'obscur passage maintenant supprimé. Mais le thé â tre, qui apparemment ne dé sirait pas les cacher, leur assigna la porte de la rue Beaujolais, qui é tait la porte royale; de crainte d'arriver trop tard, les jeunes bataillons arrivè rent trop tô t, la porte n'é tait pas ouverte, et dè s une heure les innombrables passants de la rue Richelieu virent s'accumuler une bande d'ê tres farouches et bizarres, barbus, chevelus, habillé s de toutes les faç ons,
excepté à la mode, en vareuse, en manteau espagnol, en gilet à la Robes- pierre, en toque à la Henri III, ayant tous les siè cles et tous les pays sur les é paules et sur la tê te, en plein Paris, en plein midi. Les bourgeois s'arrê taient stupé faits et indigné s. M. Thé ophile Gautier surtout insultait les yeux par un gilet de satin é carlate et par l'é paisse chevelure qui lui descendait jusqu'aux reins.
La porte ne s'ouvrait pas; les tribus4 gê naient la circulation, ce qui leur é tait fort indiffé rent, mais une chose faillit leur faire perdre patience. L'art classique ne put voir tranquillement ces hordes de barbares qui allaient envahir son asile; il ramassa toutes les balayures et toutes les ordures du thé â tre, et les jeta des combles sur les assié geants. M. de Balzac reç ut pour sa part un trognon de chou. Le premier mouvement fut de se fâ cher; c'é tait peut-ê tre ce qu'avait espé ré l'art classique; le tumulte aurait amené la police qui aurait saisi les perturbateurs, et les perturbateurs auraient é té naturellement bien lapidé s. Les jeunes gens sentirent que le moindre pré texte serait bon, et ne le donnè rent pas.
La porte s'ouvrit à trois heures et se referma. Seuls dans la salle, ils s'organisè rent. Les places ré glé es, il n'é tait encore que trois heures et demie; que faire jusqu'à sept? On causa, on chanta, mais la conversation et les chants s'é puisent. Heureusement qu'on é tait venu trop tô t pour avoir dî né, alors on avait apporté des cervelas, des saucissons, du jambon, du pain, etc. On dî na donc, les banquettes servirent de tables et les mouchoirs de serviettes. Comme on n'avait que cela à faire, on dî na si longtemps qu'on é tait encore à table quand le public entra. A la vue de ce restaurant, les locataires des loges se demandè rent s'ils rê vaient. En mê me temps, leur odorat é tait offensé par l'ail des saucissons*.
Mme VICTOR HUGO. Victor Hugo raconté -par un té moin de sa vie.
Примечания:
1. Романтики, пришедшие поддержать пьесу Виктора Гюго 2. Клакеры, которым платили, чтобы они аплодировали пьесе. 3 На которой тогда находился Театр- Франсез. 4. Имеются в виду " молодые дикари", пришедшие поддержать пьесу.
Вопросы:
* Dé terminez les é lé ments à la fois pittoresques et ré alistes contenus dans cette page. Montrez que la bonne humeur n'en est pas exclue.
ALFRED DE MUSSET (1810-1857)
aprè s l'é chec de La Nuit vé nitienne (1830), MUSSET, alors tout juste â ge de vingt ans, tourna le dos à la scè ne. Il n'en continua -pas moins d'é crire de;, piè ces, soit en les rassemblant sous le titre un peu dé sabusé de Spectacle dans un Fauteuil (1832), soit en les publiant dans la Revue des Deux Mondes ou Le Constitutionnel, mais sans penser, semble-t-il, qu'elles pussent ê tre un jour repré senté es. Or, par un curieux paradoxe, de tout le ttlé â tre'romantique, c'est celui de Musset qui est resté le plus vivant et qui, aujourd'hui encore, est joué le plus volontiers.
C'est que l'é crivain, plutô t que de pré tendre ré aliser d'ambitieuses formule:,, é coutait la voix de son cœ ur. Un cœ ur dé chiré, é cartelé entre un pessimisme foncier et une ironie prompte à dé couvrir le ridicule des choses. Dans nombre de ses piè ces, Musset s'est d'ailleurs dé doublé sous la forme d'un hé ros dé voré de tristesse, tel qu'est Fantasia, et d'un personnage de franc bon sens, tel qu'est son ami Spark...
FANTASIO(1834) SPARK. — Tu me fais l'effet d'ê tre revenu de tout.
FANTASIO. — Ah! pour ê tre revenu de tout, mon ami, il faut ê tre allé dans bien des endroits.
SPARK. — Eh bien, donc?
FANTASIO. — Eh bien, donc! où veux-tu 'que j'aille? Regarde cette vieille ville enfumé e; il n'y a pas de places, de rues, de ruelles où je n'aie traî né ces talons usé s, pas de maisons où je ne sache quelle est la fille ou la vieille femme dont la tê te stupide se dessine é ternellement à la fenê tre; je ne saurais faire un pas sans marcher sur mes pas d'hier; eh bien, mon cher ami, cette ville n'est rien auprè s de ma cervelle. Tous les recoins m'en sont cent fois plus connus; toutes les rues, tous les trous de mon imagination sont cent fois plus fatigué s; je m'y suis promené en cent fois plus de sens, dans cette cervelle dé labré e, moi son seul habitant! Je m'y suis grisé dans tous les cabarets; je m'y suis roulé comme un roi absolu dans un carrosse' doré; j'y ai trotté en bon bourgeois sur une mule pacifique, et je n'ose seulement pas y entrer comme un voleur, une lanterne sourde à la main.
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