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Fraternité.
D'ailleurs, quand, aprè s sa conversion, il se tourne vers ses anné es de jeunesse où il a passionné ment combattu dans les rangs des dé fenseurs de Dreyfus (v. p. 105, n. 1), il n'é prouve aucun regret, aucun besoin de se dé savouer: c'é tait cette mê me «religion de la pauvreté temporelle» qui dé jà l'appelait.
SOCIALISME ET CHARITÉ (1910)
Notre dreyfusisme' é tait une religion, je prends le mot dans son sens le plus litté ralement exact, une poussé e religieuse, une crise religieuse, et je conseillerais mê me vivement à quiconque voudrait é tudier, considé rer, connaî tre un mouvement religieux dans les temps modernes, bien caracté risé, bien dé limité, bien taillé, de saisir cet exemple unique. J'ajoute que pour nous, chez nous, en nous, ce mouvement religieux é tait d'essence chré tienne, d'origine chré tienne, qu'il poussait de souche chré tienne, qu'il coulait de l'antique source. Nous pouvons aujourd'hui nous rendre ce té moignage. La Justice et la Vé rité que nous avons tant aimé es, à qui nous avons donné tout, notre jeunesse, tout, à qui nous nous sommes donné s tout entiers pendant tout le temps de notre jeunesse, n'é taient point des vé rité s et des justices de concept2, elles n'é taient point des justices et des vé rité s mortes, elles n'é taient point des justices et des vé rité s de livres et de biblio- thè ques, elles n'é taient point des justices et des vé rité s conceptuelles, intel- lectuelles, des justices et des vé rité s de parti intellectuel, mais elles é taient organiques', elles é taient chré tiennes, elles n'é taient nullement modernes, elles é taient é ternelles et non point temporelles seulement, elles é taient des Justices et des Vé rité s, une Justice et une Vé rité vivantes. Et de tous les sentiments qui ensemble nous poussè rent, dans un tremblement, dans cette crise unique4, aujourd'hui nous pouvons avouer que de toutes les passions qui nous poussè rent dans cette ardeur et dans ce bouillonnement, dans ce gonflement et dans ce tumulte, une vertu é tait au cœ ur, et que c'é tait la vertu de charité. (...) Il est incontestable que dans tout notre socialisme mê me il y avait infiniment plus de christianisme que dans toute la Madeleine5 ensemble avec Saint-Pierre-de-Chaillot5, et Saint-Philippe-du- Roule5 et Saint-Honoré -d'Eylau5 II é tait essentiellement une religion de la pauvreté temporelle6 C'est donc, c'est assuré ment la religion qui sera jamais7 la moins cé lé bré e dans les temps modernes. Infiniment, d'infiniment la moins chô mé e8. Nous en avons é té marqué s si durement, si ineffaç ablement, nous en avons reç u une empreinte, une si dure marque, si indé lé bile que nous en resterons marqué s pour toute notre vie temporelle, et pour l'autre. Notre socialisme n'a jamais é té ni un socialisme parlementaire ni un socialisme de paroisse riche. Notre christianisme ne sera jamais ni un christianisme parlementaire ni un christianisme de paroisse riche. Nous avions reç u dè s lors une telle vocation de 1p. pauvreté, de la misè re mê me, si profonde, si inté rieure, et en mê me temps si historique, si é ventuelle, si é vé nementaire9 que depuis nous n'avons jamais
pu nous en tirer, que je commence à croire que nous ne pourrons nous en tirer jamais. C'est une sorte de vocation. Une destination*.
Notre Jeunesse (1910). Примечания:
1. Дрейфусарство. Дрейфусарами называли тех, кто верил в невиновность капи- тана Дрейфуса, осужденного за государственную измену. 2 Простыми понятиями справедливости и истины. 3. Присущими нашему организму. 4. Дело Дрейфуса разде- лило Францию на два противоположных, почти враждебных лагеря 5. Церкви, распо- ложенные в богатых кварталах Парижа. 6. Мирская бедность, не имеющая отношения к религии. 7. A jamais, pour toujours. 8. Праздники которой будут менее всего праздно- ваться. 9. Trois adjectifs signifiant que cette vocation fut le fait des circonstances, des é vé nements
Вопросы:
* Nous avons ici un style procé dant par bonds et par é lans, à l'image de la vie inté rieure elle-mê me, et, comme elle, fait de retours et de corrections. Donnez-en des exemples. — Comment certains courants de la pensé e catholique moderne procè dent-ils de Pé guy?
ANDRÉ GIDE (1869-1951)
il ne faut pas exagé rer l'importance des Nourritures terrestres (1897) dans l'œ uvre d'ANDRÉ GIDE. L'auteur lui-mê me a souligné qu'il s'agissait d'un livre de jeunesse, é crit par un «convalescent» tout enivré de se dé couvrir gué ri. Pourtant, c'est cette merveilleuse ivresse, cette joie dé bordante de sentir couler dans ses veines l'iné puisable ruissellement de la vie qui ont fait le succè s de l'ouvrage. Et, s'il y a parfois quelque excè s dans le paganisme fré né tique qui s'en dé gage. Les Nourritures terrestres n'en ont pas moins inspiré à toute une gé né ration l'impé rieux besoin, selon le mot de Gide lui-mê me, d'une «disponi- bilité » sans limite...
Ê TRE TOUJOURS TOUT ENTIER DISPONIBLE...
A dix-huit ans, quand j'eus fini mes premiè res é tudes, l'esprit las de travail, le cœ ur inoccupé, languissant de l'ê tre, le corps exaspé ré par la contrainte, je partis sur les routes, sans but, usant ma fiè vre vagabonde. Je connus tout ce que vous savez: le printemps, l'odeur de la terre, la floraison
des herbes dans les champs, les brumes du matin sur la riviè re, et la vapeur du soir sur les prairies. Je traversai des villes, et ne voulus m'arrê ter nulle part. Heureux, pensais-je, qui ne s'attache à rien sur la terre et promè ne une é ternelle ferveur2 à travers les constantes mobilité s. Je haï ssais les foyers, les familles, tous lieux où l'homme pense trouver un repos; et les affections continues, et les fidé lité s amoureuses, et les attachements aux idé es — tout ce qui compromet la justice —; je disais que chaque nouveauté doit nous trouver toujours tout entiers disponibles (...).
Chaque jour, d'heure en heure, je ne cherchais plus rien qu'une pé né tra- tion toujours plus simple de la nature. Je possé dais le don pré cieux de n'ê tre pas trop entravé par moi-mê me. Le souvenir du passé n'avait de force sur moi que ce qu'il en fallait pour donner à ma vie l'unité: c'é tait comme le fil mysté rieux qui reliait Thé sé e à son amour passé, mais ne l'empê chait pas de marcher à travers les plus nouveaux paysages. Encore ce fil dut-il ê tre rompu... Palingé né sies4 merveilleuses! Je savourais souvent, dans mes courses du matin, le sentiment d'un nouvel ê tre, la tendresse de ma perception. «Don du poè te, m'é criais-je, tu es le don de perpé tuelle ren- contre» — et j'accueillais de toutes parts. Mon â me é tait l'auberge ouverte au carrefour; ce qui voulait entrer, entrait*.
Les Nourritures terrestres. Livre IV (1897). Примечания:
1. Букв, запас, резерв. Имеется в виду способность воспринимать все идеи и чув- ства, на которых вырастает, воспитывается человек. 2. Пыл, страсть. Это слово очень любимо Жидом, который неоднократно восклицает: «Nathanaë l, je t'enseignerai la ferveur...» 3. Нить Ариадны, благодаря которой Тезей вышел из лабиринта. 4. Палин- генез (греч.) — возвращение к жизни, возрождение.
Вопросы:
* Montrez qu'il s'agit ici moins d'une page de pensé e que d'une sorte d'effusion lyrique. Quel genre de sé duction a-t-elle pu exercer sur la gé né ration contemporaine d'André Gide?
GEORGES DUHAMEL (1884 1966)
Pas plus que Charles Pé guy ou qu'André Gide, GEORGES DUHAMEL n'est un «penseur» de profession. Mais, pourvu d'une sensibilité vive et profonde, il a pris une position de philosophe en protestant avec vé hé mence contre les
du progrè s industriel (Scè nes de la Vie future) et leurs horribles consé quences en temps de guerre (Vie des Martyrs). A ses yeux, la Civilisation ne ré side point dans les perfectionnements du machinisme, mais dans la sauvegarde des grands sentiments humains...
CIVILISATION
Il faudrait d'abord savoir ce que vous appelez civilisation. Je peux bien vous demander cela à vous, d'abord parce que vous ê tes un homme intelligent et instruit, ensuite parce que vous en parlez tout le temps, de cette fameuse civilisation.
Avant la guerre, j'é tais pré parateur dans un laboratoire industriel. C'é tait une bonne petite place; mais je vous assure que si j'ai le triste avantage de sortir vivant de cette catastrophe1 je ne retournerai pas là -dedans. La campagne! La pure cambrouse2! Quelque part bien loin de toutes les sales usines, un endroit où je n'entende plus jamais grogner vos aé roplanes et toutes vos machines qui m'amusaient naguè re, quand je ne comprenais rien à rien, mais qui me font horreur maintenant, parce qu'elles sont l'esprit mê me de cette guerre, le principe et la. raison de cette guerre!
Je hais le xxe siè cle, comme je hais l'Europe pourrie et le monde entier, sur lequel cette malheureuse Europe s'est é talé e, à la faç on d'une tache de cambouis3. Je sais bien que c'est un peu ridicule de sortir de grandes phrases comme cela; mais bah! je ne raconte pas ces choses à tout le monde, et puis, autant ce ridicule-là qu'un autre! Je vous le dis, j'irai dans la montagne et je m'arrangerai pour ê tre aussi seul que possible (...).
Croyez-le bien, monsieur, quand je parle avec pitié de la civilisation, je sais ce que je dis; et ce n'est pas la té lé graphie sans fil qui me fera revenu- sur mon opinion. C'est d'autant plus triste qu'il n'y a rien à faire: on ne remonte pas une pente comme celle sur laquelle roule dé sormais le monde.
Et pourtant!
La civilisation, la vraie, j'y pense souvent. C'est, dans mon esprit, comme un chœ ur de voix harmonieuses chantant un hymne, c'est une statue de marbre sur une colline dessé ché e, c'est un homme qui dirait: «Aimez- vous les uns les autres!» ou: «Rendez le bien pour le mal!» Mais il y a prè s de deux mille ans qu'on ne fait plus que ré pé ter ces choses-là (...).
On se trompe sur le bonheur et sur le bien. Les â mes les plus gé né reuses se trompent aussi, parce que le silence et la solitude leur sont trop souvent refusé s. J'ai bien regardé l'autoclave4 monstrueux sur son trô ne. Je vous le dis, en vé rité, la civilisation n'est pas dans cet objet, pas plus que dans les
pinces brillantes dont se servait le chirurgien. La civilisation n'est pas dans toute cette pacotille terrible; et, si elle n'est pas dans le cœ ur de l'homme, eh bien, elle n'est nulle part*.
Civilisation (1918).. Примечания:
\. Имеется в виду война 1914 -1918 гг. 2. «Voilà ce qu'il me faut!» — cambrouse (жарг.), глухая деревня, медвежий угол. 3. Отработанное машинное масло. 4. Стери- лизатор, емкость для кипячения хирургических инструментов (сцена происходит в операционной). 5. Безделушки, хлам, не имеющий реальной ценности.
Вопросы:
* Que faut-il penser de cette ré volte de l'homme contre la machine/ — On rapprochera l'attitude de G. Duhamel de celles de Pé guy et de Gide.
GEORGES BERNANOS (1888-1948)
AVANT d'ê tre une des plus grandes voix que la Ré sistance franç aise ait fait entendre pendant l'occupation, GEORGES BERNANOS s'é tait signalé comme un pamphlé taire redoutable et inspiré. Catholique, mais impitoyable pourfendeur des «bien-pensants» de toute espè ce, il a exprimé avec force la nostalgie d'une fol militante aussi é loigné e des tié deurs de l'obé issance passive que du «ré a- lisme» des «combinards de la dé votion».
A cet é gard, l'un de ses personnages, le curé de Torcy, semble bien exprimer, dans son rude langage de prê tre flamand, l'idé al vé hé ment de Bernanos.
LE CURÉ DE TORCY
Le curé de Torcy s'adresse au jeune curi d'Ambricourt (fas-dt-Calais), a qui il reproche de Muaquer d'é nergie.
Il est devenu tout rouge et m'a regardé de haut en bas. «Je me demande ce que vous avez dans les veines aujourd'hui, vous autres jeunes prê tres. De mon temps, on formait des hommes d'É glise — ne froncez pas les sourcils, vous me donnez envie de vous calotter1 —, oui, des hommes d'É glise, prenez le mot comme vous voudrez, des chefs de paroisse, des maî tres, quoi, des hommes de gouvernement. Ç a vous tenait un pays, ces gens-là, rien qu'en haussant le menton. Oh! je sais ce que vous allez me
dire: ils mangeaient bien, buvaient de mê me, et ne crachaient pas2 sur les cartes. D'accord! Quand on prend convenablement son travail, on le fait vite et bien, il vous reste des loisirs et c'est tant mieux pour tout le monde. Maintenant les sé minaires nous envoient des enfants de chœ ur, des petits va-nu-pieds qui s'imaginent travailler plus que personne parce qu'ils ne viennent à bout de rien. Ç a pleurniche au lieu de commander. Ç a lit des tas de livres et ç a n'a jamais é té fichu3 de comprendre — de comprendre, vous m'entendez — la parabole de l'É poux et de l'É pouse4. (...) J'avais jadis —je vous parle de mon ancienne paroisse — une sacristaine5 é patante6, une bonne sœ ur de Bruges7 sé cularisé e8 en 1908, un brave cœ ur. Les huit premiers jours, astique que j'astique9, la maison du bon Dieu s'é tait mise à reluire comme un parloir10 de couvent, je ne la reconnaissais plus, parole d'honneur! Nous é tions à l'é poque de la moisson, faut dire11, il ne venait pas un chat, et la satané e12 petite vieille exigeait que je retirasse mes chaussures — moi qui ai horreur des pantoufles! Je crois mê me qu'elle les13 avait payé es de sa poche. Chaque matin, bien entendu, elle trouvait une nouvelle couche de poussiè re sur les bancs, un ou deux champignons tout neufs sur le tapis de choeur14, et des toiles d'araigné es — ah! mon petit! des toiles d'araigné es de quoi faire un trousseau15 de marié e. «Je me disais: astique toujours, ma fille, tu verras dimanche.» Elle dimanche est venu. Oh! un dimanche comme les autres, pas de fê te carillonné e16, la clientè le ordinaire, quoi. Misè re! Enfin, à minuit, elle cirait et frottait encore, à la chandelle. Et quelques semaines plus tard, pour la Toussaint, une mission17 à tout casser18 prê ché e par deux Pè res ré demptoristes, deux gaillards19. La malheureuse passait ses nuits à quatre pattes entre son seau et sa vassingue20 — arrose que j'arrose21 — tellement que la mousse commenç ait de grimper le long des colonnes, l'herbe poussait dans les joints des dalles. Pas moyen de la raisonner, la bonne sœ ur! Si je l'avais é couté e, j'aurais fichu22 tout mon monde à la porte pour que le bon Dieu ait Ips pieds au sec, voyez-vous ç a? Je lui disais: «Vous me rainerez en potions» — car elle toussait, pauvre vieille! Elle a fini par se mettre au lit avec une crise de rhumatisme articulaire, le cœ ur a flanché 23 et plouf24! voilà ma bonne sœ ur devant saint Pierre*. En un sens, c'est une martyre, on ne peut pas soutenir le contraire. Son tort, ç a n'a pas é té de combattre la saleté, bien sû r, mais d'avoir voulu l'ané antir, comme si c'é tait possible. Une paroisse, c'est sale, forcé ment. Une chré tienté, c'est encore plus sale. Attendez le grand jour du Jugement, vous verrez ce que les anges auront à retirer des plus saints monastè res, par pelleté es — quelle vidange! Alors, mon petit, ç a prouve que l'É glise doit ê tre une solide mé nagè re, solide et raisonnable. Ma bonne
sœ ur n'é tait pas une vraie femme de mé nage: une vraie femme de mé nage sait qu'une maison n'est pas un reliquaire25. Tout ç a, ce sont des idé es de poè te**.»
Journal d'un Curé de Campagne (1936)
Примечания:
1. Надавать пощечин (разг.) 2. Не гнушаются (разг.) перекинуться в картишки 3. Способны (разг.). 4. В этой притче Супруг — это Христос, Супруга — христиан екая церковь. 5. Монашка, следящая за порядком в ризнице. On dit plutô t: sacristine 6 Поразительная, потрясающая (разг.). 7. Брюгге, город в Бельгии. 8. Живущая в ми- ру, но тем не менее принадлежащая церкви. 9. Изо всех сил наводила блеск (разг) 10. Помещение в монастыре, где принимают посетителей. 11. Надо сказать, отметить (разг.) И далее' в церкви не было ни единого прихожанина (из-за жатвы) 12. Чертова (разг). 13. Домашние туфли. 14. Хоры, место для певчих в церкви
15. Белье и носильные вещи, которые новобрачная приносит в дом как приданое
16. Праздник, отмечаемый колокольным благовестом. 17 Серия проповедей, которые произносят монахи, специально для этого направленные в приход 18 Приготов- ленная с огромными стараниями (разг). 19. Крепкими, жизнерадостными людьми, весельчаками. 20 Слово фламандского происхождения: половая тряпка. 21 Она во- всю намывала. 22 Я бросил бы (разг.). 23. Сердце сдало. 24. Хлоп! Бац! (звукоподр.). 25. Реликвиарий, рака со святыми мощами.
Вопросы:
* Etudiez le langage du curé de Torcy. Montrez qu'il est en rapport avec la personnalité de ce prê tre.
** Quel est le sens symbolique de l'anecdote conté e ici?
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